C’est le résultat qui compte

Peu connu, mais élu au premier tour en 2016, le Lacois Olivier Curty compte sur son bilan à la tête de la DEE pour garder son siège.

Par XAVIER SCHALLER (La Gruyère)

Avec trois sièges au Conseil d’Etat, Le Centre est surreprésenté. Vous sentez-vous en danger?

Une élection n’est jamais gagnée d’avance. Mais je peux faire valoir un bilan très dense aux niveaux législatif, stratégique ou des infrastructures. Durant cette crise du Covid, je me suis aussi engagé à fond. Fribourg s’en sort bien et est toujours cité en exemple, pour la rapidité et la créativité avec lesquelles il a mis en place les mesures.

A la Direction de l’économie et de l’emploi (DEE), vous avez le beau rôle. Vous êtes celui qui distribue l’argent…

J’ai pensé la même chose au début. Cela ne s’est pas révélé être complètement juste. La souffrance était telle au niveau économique, aussi une souffrance psychologique et émotionnelle, que mes services et moi avons quand même dû encaisser les critiques. Mais au final, en effet, c’est quand même un peu un rôle de Père Noël, avec plus de 600 millions versés à fonds perdu à l’économie fribourgeoise.

Avec le dossier des éoliennes, vous êtes plus proche du Père Fouettard…

Pour moi, la question des éoliennes n’était pas nouvelle. Cela roulait depuis 2017 sans susciter de réactions. A un moment donné, il y a eu cette opposition qui s’est très bien formée et qui s’est très bien défendue. La DEE a continué de communiquer, beaucoup. Elle a répondu à une dizaine d’instruments parlementaires, en restant très neutre. Nous n’avons rien à nous reprocher.

Que répondez-vous à ceux qui vous jugent trop calme, consensuel, effacé même?

Je ne suis pas un Charles de Gaulle et je ne veux pas l’être. Pour moi, l’efficacité prime, sans considération de style politique. Je peux prendre une voix grave et vous engueuler. Mais ce n’est pas mon style et je n’obtiendrai pas davantage de résultats.

Vous pouvez compter sur le vote germanophone…

Un seul conseiller d’Etat pour deux districts germanophones, c’est peu. Il y a quand même des différences, on l’a vu notamment durant cette crise: les deux régions linguistiques n’étaient pas touchées au même moment, ni avec la même gravité. Mais évidemment, pour avoir une chance d’être réélu, il me faut aussi le soutien des francophones.

Quelle est votre vision du bilinguisme dans le canton?

C’est une chance que nous n’exploitons pas encore complètement. J’ai évidemment pris de nombreuses initiatives dans ma Direction. Deux services sont maintenant labellisés pour le bilinguisme et je pousse aussi cela au niveau de la formation professionnelle, où j’essaie d’ouvrir des classes bilingues.

Avez-vous participé à Morat-Fribourg cette année?

Malheureusement pas, j’avais déjà accepté d’autres engagements. J’avais beaucoup misé sur la Corrida bulloise, mais elle a été annulée. J’ai quand même fait deux courses ces derniers mois.

Quels sont les dossiers prioritaires pour le canton?

Il y a la formation professionnelle continue. Ceux qui ne trouvent plus leur bonheur sur le marché du travail doivent pouvoir se réorienter. Toutes ces questions autour de l’innovation, pour rendre plus accessible le transfert technologique, aussi pour les PME. La transformation énergétique est également prioritaire. Les résultats sont déjà réjouissants, mais la vitesse du changement est encore insuffisante de mon point de vue. Enfin, je citerais la nouvelle Loi sur le tourisme qui va passer la semaine prochaine au Grand Conseil. L’ambition est forte: faire du canton un pôle d’excellence suisse du tourisme doux.

De quoi faire de Fribourg autre chose qu’un canton-dortoir?

Durant cette législature, le nombre d’emplois équivalents plein-temps créé dépasse déjà la croissance démographique, qui est pourtant très forte. Cela signifie que nous avons créé un poste pour chaque nouveau citoyen venant de l’extérieur. Et en plus, nous avons créé des postes supplémentaires qui font diminuer le nombre de pendulaires. Nous allons continuer dans ce sens.

Un parcours atypique Olivier Curty est né en 1972 et a grandi à Saint-Ours. Marié, père de deux filles de 14 et 11 ans, il habite maintenant à Morat. Il a commencé sa formation par un CFC d’employé de commerce dans une fiduciaire. Il a enchaîné avec une maturité au Collège Saint-Michel, puis une licence ès sciences politiques, à l’Université de Lausanne en 1996 et un diplôme en relations internationales, à l’Université du Kent en Angleterre, la même année. Olivier Curty parle ainsi couramment allemand, français et anglais. Il passe encore deux ans à l’Université de Bâle, pour un Master of advanced european studies. Son parcours professionnel débute comme analyste en politique de sécurité au Département fédéral de la défense. Il rejoint ensuite la FedPol en 2005, dans l’état-major pour le développement international et la gestion de crise. En 2008, il est nommé vicechancelier d’Etat du canton de Fribourg. Le Centre le choisit comme troisième candidat pour l’élection au Grand Conseil de 2016, malgré son manque de notoriété et d’expérience politique. L’entente de droite, avec le PLR et l’UDC, lui permet d’être élu au premier tour.

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