Allocution d’Olivier Curty, Conseiller d’Etat, Ministre de l’Economie et de l’Emploi
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AG Fédération patronale et économique (FPE)
Bulle, le 30 septembre 2020
Es gilt das gesprochene Wort – Seul le texte prononcé fait foi
Madame la Directrice,
Mesdames et Messieurs en vos titres et fonctions,
Chers membres de la Fédération,
L’année 2020 a marqué une rupture brutale dans notre mode de vie, et dans la marche des affaires. En janvier pourtant, les échéances habituelles étaient planifiées, nos agendas bien garnis, les objectifs fixés, et les projets sur les starting blocks. Et voilà qu’un virus entre en scène et, en quelques semaines, vient renverser la table, bousculer tous les plans, redistribuer toutes les cartes à l’échelle planétaire. D’un coup, comme ça, en trois mois, le monde bascule. Dans l’urgence de la mise en place des premières mesures fédérales et cantonales, 22’000 appels ont été adressés aux différentes hotlines cantonales, dont plus de 10’000 pour les deux lignes gérées par la DEE, pour les RHT notamment. Et puis les revendications ont commencé à pleuvoir vis-à-vis du canton. Dans ce qu’il faut bien appeler un moment de sidération, les chiffres articulés se sont parfois envolés à 200 millions, ou même 500 millions de francs. A l’inverse, des voix s’élevaient pour s’opposer à toute intervention étatique spécifique. Dans cette effervescence, certains plaidaient, que dis-je, exigeaient! la fermeture des chantiers. La pression était énorme. Ne pas proposer la fermeture des chantiers au Conseil d’Etat, a d’ailleurs été l’une des décisions les plus délicates à prendre durant cette période, tant la tension était forte.
Mesdames et Messieurs,
Depuis le mois de mars, l’économie subit le coup de frein terrible que l’on sait.
- Plus de 8000 demandes de RHT à ce jour dans notre canton, contre une trentaine en moyenne les années précédentes
- Plus de 7 millions d’heures de travail perdues
- Un saut de plus de 42% du nombre de demandeurs d’emploi
En tout, dans le canton, environ 380 millions de francs ont été versés en 9 mois pour les RHT, le chômage et l’APG, dont une partie de cette dernière par la FPE. Du jamais vu. A titre de comparaison, l’ensemble de ces coûts ont représenté une dépense de 116 mios pour les 12 mois de 2019. Dès avril, nous avons déployés deux paquets de mesures urgentes, dotés d’une enveloppe estimée à 60 millions de francs. Des mesures choisies parmi une centaine de propositions étudiées par la DEE. Puis au début septembre, le CE a aussi approuvé un plan de relance de 50 millions, regroupant 25 mesures choisie parmi 70 propositions cette fois. Durant toute cette période, il y a eu d’innombrables interventions auprès du Département de M. Parmelin, par le biais de la CDEP. L’objectif était de faire entendre la voix des cantons, et pousser à la mise en place de certaines mesures que nous jugions indispensables pour notre économie. Un objectif atteint. Ce qui démontre une nouvelle fois l’importance de siéger dans les conférences spécialisées, où les membres du CE sont très bien représentés, et où ils peuvent avoir une influence décisive.
Mesdames et Messieurs,
Depuis le début de la pandémie, le CE a dégagé une enveloppe globale cantonale de 135 millions de francs à fonds perdus.
- Lutter contre les effets de cette crise
- Eviter les faillites et les licenciements
- Soutenir la relance de notre économie dans la durée…
…a été et reste notre devise principale depuis le début de la crise.
Certaines mesures ont eu un succès fulgurant. En trois mois, par exemple, notre mesure d’aide aux commerces de proximité «Kariyon» a permis d’injecter 17 millions de francs dans l’économie locale.
Notre mesure de prise en charge des baux et loyers commerciaux, destinée aux petites structures et au restaurants, a permis de diminuer les charges fixes de quelque 2200 locataires, dont environ 540 restaurants, pour un montant global de près de 5 millions de francs.
- Les entreprises et les indépendants,
- Les start-up et les médias,
- Les commerces de proximité et les apprentis,
- les gens précarisés par la crise, de même que les acteurs culturels et du tourisme (dont les hôtels), ont été aidés par des mesures ciblées, rapides et efficaces.
Concernant l’aide au tourisme, un orateur présent lors d’une récente réunion des 13 régions touristiques du pays, a même souligné que le canton de Fribourg avait été le premier du pays à agir aussi vite, de manière si structurée, et avec un soutien d’une telle ampleur. Contrairement à ce que prétendent des acteurs bien éloignés de l’économie cantonale, le CE a donc été très rapide et efficace dans son action. Nous étions par exemple prêts à lancer une mesure de crédits garantis dès la mi-mars, mesure que la Confédération a prise à son compte quelques jours plus tard. Et je dois vous avouer qu’au sein de la CDEP, mes collègues des affaires économiques d’autres cantons reprochaient régulièrement à Fribourg d’en faire trop. Ce que j’ai toujours pris pour un compliment !
Mesdames et Messieurs,
Mes équipes ont abattu un boulot incroyable pour appliquer les mesures fédérales dans des délais record, puis créer et mettre en place des mesures cantonales ambitieuses, le tout dans un environnement très mouvant. Travailler en tournus sur deux équipes, en sacrifiant la plupart de ses weekends, a été le nouveau standard à l’Etat de Fribourg durant la crise. L’Etat a fait le job. Et il continuera à le faire, en restant évidemment à l’écoute de tous les partenaires économiques, dont la FPE.
Je tiens d’ailleurs à remercier la Fédération pour son précieux et indispensable soutien durant la première phase de cette crise, et en particulier sa Directrice Mme Nadine Gobet. Pour l’heure, la conjugaison des mesures fédérales et cantonales a permis de limiter la casse. Nous n’avons pas observé de hausse des faillites, ni de multiplication des licenciements collectifs. Si l’année 2020 sera synonyme de récession, certains instituts de prévision restent pourtant optimistes pour 2021. Une récente étude de Swiss Re estime que « l’économie suisse est la plus résiliente du monde face à la crise du Covid-19 ». Dans le canton de Fribourg, nous pouvons aussi nous appuyer sur un tissu économique solide, et très diversifiée. Nous avons donc des raisons et les moyens de rester combattifs. Bien sûr la situation reste complexe et difficilement lisible. Cela peut pousser à un excès de prudence dans les entreprises. Personnellement, j’ai toujours été convaincu que c’est précisément dans l’audace et l’action, que l’on peut transformer les obstacles en opportunités. D’ailleurs, certaines entreprises ont continué à investir durant la crise, comme Nespresso ou Vifor, pour ne citer que les plus grandes.
Et même s’il reste difficile de faire des pronostics, j’ai tout de même des convictions.
- La conviction que nous allons nous en sortir.
- La conviction que nous avons les capacités de rebondir.
- La conviction que l’agilité et l’audace de nos entrepreneurs, VOTRE agilité et VOTRE audace,, représentent une force considérable pour penser et construire l’avenir, au-delà de cette crise.
Mesdames et Messieurs,
Nous avons déjà connu plusieurs phases dans cette crise. Une phase d’urgence, une phase de relance que nous entamons, puis nous allons aussi devoir résoudre les cas de rigueur. Pour le reste, personne ne peut dire combien de temps durera cette crise. Ni s’il y aura d’autres stades critiques. Les inquiétudes sont fortes, les risques qui pèsent sur notre économie bien réels. Malgré ces incertitudes, nous ne pouvons pas nous contenter de subir cette crise. Nous devons l’empoigner pour en extraire les opportunités. Pour les entreprises, cela peut être de faire un saut technologique pour améliorer la productivité. Ou réfléchir à des projets collaboratifs avec nos hautes écoles, pour développer de nouveaux produits, ou améliorer des processus. Nous avons aussi l’opportunité de faire un saut écologique, en matière d’énergie renouvelables, ou d’efficience des bâtiments par exemple. Des opportunités existent.
Je le répète, il est risqué de subir les évènements. Ensemble, empoignons donc cette crise à bras le corps. Mesdames et Messieurs, vous l’aurez compris, je vous invite au combat !
Merci de m’avoir écouté.