La voie est ouverte pour des éoliennes fribourgeoises

Validé par la Confédération, le deuxième volet du Plan directeur cantonal définit sept parcs éoliens potentiels, dont quatre pratiquement prêts à l’emploi. Aux communes et aux investisseurs de proposer maintenant des projets, et aux opposants de faire entendre leurs arguments.

Article de XAVIER SCHALLER (La Gruyère)

«Il a fallu vingt ans au canton pour en arriver là. Maintenant c’est aux communes et aux développeurs de jouer.» Directeur de l’économie et de l’emploi, Olivier Curty a présenté à la presse, jeudi à La Joux, la planification éolienne fribourgeoise. Cette délimitation des sept zones est incluse dans le deuxième volet du Plan directeur cantonal, que la Confédération a validé en août dernier.

Quatre sites sont annoncés avec une coordination réglée, dont trois dans le Sud (voir carte). Le parc éolien des Monts-de-Vuisternens court sur trois communes: Vuisternens-devant-Romont, Siviriez et Le Flon. Pour atteindre une production annuelle de 36 à 42 GWh par année, six ou sept machines de dernière génération pourraient être montées. Le même nombre est prévu au Glaney, sur le territoire de Billens-Hennens, Siviriez et Ursy. Mais avec une production estimée dans une fourchette un peu inférieure (33 à 39 GWh/ an). Pour le site du massif du Gibloux, huit communes sont concernées: Sâles, Le Châtelard, Vuisternens-devant- Romont, Grangettes, Sorens, Villorsonnens, Pont-en-Ogoz et Gibloux. Elles pourraient accueillir 8 à 12 mâts et fournir entre 48 et 72 GWh par an. La coordination est aussi réglée aux Collines de La Sonnaz (6 à 8 éoliennes, 33 à 43 GWh/an). En revanche, elle est annoncée en cours pour les sites d’Autour-de-l’Esserta (Sâles, Vuisternens-devant- Romont, La Verrerie et Vaulruz), de Surpierre-Cherry et du Schwyberg. «Nous devons encore apporter quelques compléments, explique Serge Boschung, chef du Service de l’énergie (SdE). Cela pourrait se faire dans les années à venir.»

Encore bien des étapes

«A part Groupe E, il n’y a pas beaucoup d’investisseurs intéressés», constate Olivier Curty. Et, avant qu’un projet n’aboutisse, il faudra encore affiner le périmètre précis du parc et le positionnement des machines. Une modification de la planification territoriale de la ou des communes concernées est aussi nécessaire. Ensuite seulement, une demande de permis de construire pourra être déposée. La conférence de presse a eu lieu dans la commune de Vuisternens-devant-Romont qui pourrait vivre ce scénario. «Le Conseil communal a déjà décidé que, s’il y a un jour des éoliennes, ce sera sur du terrain communal, indique le syndic Christian Pittet. Cela pour éviter toutes discussions entre propriétaires privés.»

Vent d’hiver bienvenu

Avant 2000, la Suisse était plutôt exportatrice de courant hivernal. «Depuis, nous sommes de plus en plus dépendants des importations, constate Markus Geissmann, responsable du domaine énergie éolienne à l’Office fédéral de l’énergie. Sans mesures adéquates, cela va encore s’accentuer avec la fin de service des centrales nucléaires.» Or, c’est en hiver que le vent est le plus généreux et que deux tiers de l’électricité éolienne sont produits. Au moment où les besoins en chauffage et en éclairage sont les plus forts. Au moment aussi où les productions solaire et hydraulique sont les plus faibles. Le vent est ainsi complémentaire aux autres énergies renouvelables.

Même en Suisse? «On entend que les éoliennes sont efficaces en mer du Nord, mais jamais en Suisse, note Markus Geissmann. C’est faux! D’ailleurs, les régions voisines sont avancées dans le domaine, avec une géographie et une densité de population similaire à la Suisse.» Alors que le pays compte 42 éoliennes, l’Autriche en a construit 1340, la Bourgogne Franche-Comté 397, l’Auvergne Rhône-Alpes 267 et le Bad- Wurtemberg 790. «Depuis 2012, Groupe E gère un parc éolien en France, entre Paris et Dijon, indique Alain Sapin, directeur énergie électrique de l’entreprise. Cette situation correspond à ce que l’on veut faire chez nous.» Il souligne que dans le canton, «il n’y aura pas besoin de nouvelles lignes électriques aériennes pour les éoliennes, tout pourra être enterré.» La construction de machines de 140 mètres, produisant chacune l’équivalent de la consommation de 1500 ménages, nécessitera d’immenses grues et de larges routes d’accès, ce qui inquiète notamment en forêt. «Mais après, il y aura peu de bruit et plus aucun transport lourd.»

Energies complémentaires

En mai 2017, le peuple suisse a aussi accepté la Stratégie énergétique 2050. Celle-ci prévoit de sortir du nucléaire, d’économiser l’énergie et de substituer progressivement aux énergies fossiles des énergies renouvelables. «Pour l’énergie éolienne, Fribourg a le troisième meilleur potentiel du pays, après les cantons de Vaud et de Berne», rappelle Olivier Curty. Le Conseil d’Etat avait, en 2009 déjà, l’objectif de produire 160 GWh par an pour 2030. «Pour atteindre notre but, quatre sites bien équipés pourraient suffire», précise Olivier Curty. Groupe E estime l’investissement total à 150 millions de francs. Et selon un sondage M.I.S Trend réalisé à sa demande, 72% des personnes interrogées sont favorables aux éoliennes dans le canton.